La Tunisie au JT : connaissait-on la situation sous Ben Ali?

18 Fév

Ben Ali a pris le pouvoir il y a plus de 23 ans. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que la télévision française a souvent été ambiguë vis-à-vis de ce pays.

A la fin des années 80’s, le président Mitterrand fait un voyage en Tunisie,  où il rencontre par deux fois le président Ben Ali. Ce déplacement est l’objet d’un reportage sur Antenne 2. Le présentateur le qualifie  de « dépaysement garantie » et présente un pays très cliché : musique, derviches tourneurs, moment de calme sous les figuiers. Le président n’était élu que depuis un an et tous les espoirs étaient alors permis.

Ce n’est pas le cas à la fin les années 90. Les droits de l’homme en Tunisie sont montrés à la télévision (reportage de 1998), les exactions parfois mis en avant. Pourtant, lors du déplacement du président Chirac en 1995, la relation entre les deux hommes est décrites comme « chaleureuse ». Le tournant se place donc à la fin de la décennie, même si la Tunisie est rarement clairement montrée du doigt.

Un début de critique : les années 2000


Dans les années 2000, les journaux télévisés français deviennent relativement plus critique de la situation en Tunisie, proposant par exemple des reportages dès 2002 sur la liberté d’expression, comme au JT de 20h de France 2. . De même en 2008, où ce reportage montre la difficulté qu’à l’opposition de se faire écouter, surtout lors de manifestations dans le pays, où les infos sont totalement bloquées. Certes, le journaliste s’emballe un peu en parlant même « d’Intifada »… Le fait que Ben Ali bâillonnait l’opposition était donc connu et l’information été diffusée en France.

Pourtant en 2008, au journal de 13 heures, on peut voir le président Sarkozy en voyage en Tunisie, où ce dernier met en cause des « observateurs biens sévères avec la Tunisie », un pays qui développe « la tolérance ». Ce qui n’empêche pas le journaliste de lancer une petite pique au présidente en fin de reportage. Depuis la chute du régime, Rama Yade s’est d’ailleurs exprimée au micro d’Europe 1, affirmant que lors de ce voyage de 2008, elle avait vu venir la chute du régime de Ben Ali…

Lors de la réélection de Ben Ali en 2009, on parle certes de l’absence de pluralité et de liberté de parole en Tunisie. Mais du point de vue économique, les journalistes expriment une certaine admiration pour la Tunisie qui a « réussit à moins souffrir de la crise économique que les autres » (reportage de France 2). C’est pourtant le chômage record, qui touche 1 jeune diplômé tunisien sur 5, qui a attiré les premiers jeunes dans la rue. Mohamed Bouazizi s’immole tout d’abord parce qu’il ne peut plus travailler pour nourrir sa famille de 7 enfants. Il devient le point de départ de toute la contestation.

Encore des événements qui ont fait mentir les journalistes, les analystes politiques, mais surtout placer sous les projecteurs le cynisme des relations entretenues pendant des années entre la France et l’Algérie. Voir la fin du reportage de Serge Kovacs en 2005  « Aujourd’hui à Tunis, technologies et libertés n’avancent pas au même rythme ». Presque 6 ans plus tard, c’est par Facebook que se mettra en place la mobilisation qui amènera au départ de Ben Ali.

Déborah Gay

Laisser un commentaire