Le rap, bande-son des révolutions arabes

18 Fév

Le hip-hop arabe a longtemps eu du mal à s’exprimer. La censure lui préfère les mélodies énamourées du raï, sans substance politique. Mais les mouvements récents de révolte sont en train de changer la donne. La parole se libère, et avec elle les textes des rappeurs.

El General, rappeur et symbole de la révolte tunisienne.

Depuis quelques semaines, les clips de hip-hop critiquant les régimes arabes se multiplient sur Internet.  Dans ces vidéos: revendications sociales, condamnation de la corruption et de la classe politique… Mais aussi appels à la révolte ou hommages aux manifestants. En provenance de Tunisie, d’Egypte, d’Algérie ou même de Lybie, les chansons des rappeurs soufflent sur les braises de la révolte. Dernière arrivée sur le net, cette vidéo présente les heurts de la nuit de mardi à mercredi en Lybie. En arrière plan, un morceau de hip-hop clamé en arabe. 

Les images de violence sont entrecoupées de slogans politiques. Enough! le titre est clair, le style aussi: l’heure n’est pas à la franche rigolade.

En Égypte, même ambiance. Ce blog d’informations francophones recense les hymnes hip-hop de la révolution qui a vu tomber Moubarak. Même sans comprendre les paroles, l’énergie est palpable.  Ce clip, posté le 21 janvier – en plein troubles – débute sur un logo présentant un poing fermé surplombant le mot révolution.

Et les Égyptiens ne sont pas seuls. Des artistes internationaux viennent les épauler. Le clip ci-dessous a été produit par quelques artistes américains et canadiens. Le titre, #25janv est à la fois une référence au 25 janvier,  la date qui a vu le mouvement égyptien débuter, et aux hashtags de twitter, un des principaux outils de communication  des manifestants et de leurs soutiens.

En France, c’est le fils d’Ali Mecili, l’opposant algérien assassiné à Paris en 1987, qui dézingue le président  Bouteflika – et ses soutiens français- dans son titre 90%.

Un  soutien international qui fait écho à la solidarité clamée par la Zulu Nation du début du hip-hop. Né dans les ghettos noirs américains, le rap a toujours eu une frange revendicative. Les pionniers Africa Bambataa, Public Enemy, ou Nas un peu plus tard,  dénonçaient dans leurs textes la situation sociale des Afro-américains. En débarquant en Europe, notablement en France,  le hip-hop amène lui avec sa colère et ses désirs de révolte. « Qu’est ce qu’on attends pour foutre le feu » clamait NTM en 1995.

Depuis, le rap a essaimé partout dans le monde. Il est devenu multi-forme.  Dans les boites de nuit et les bars plus ou moins branchés, c’est désormais une musique festive et légère.  Mais il n’a jamais déserté les quartiers populaires ni coupé ses racines contestataires. C’est de là qu’il puise sa force originelle  et c’est là que sont créés les brulots qui inondent aujourd’hui Internet et les pays arabes. Le rap, musique du peuple, a enfin trouvé sa révolution.

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