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Tunisie : El général contre le Raïs

18 Fév

Hamada Ben Amor, rappeur tunisien de 22 ans, surnommé El général, a fait tomber  le président Ben Ali, grâce à  trois chansons et  au web. Rencontre avec un jeune armé de mots…

« Président ton peuple est mort » scande El général, alias Hamada Ben Amor, rappeur tunisien, dont la chanson a fait le tour du web tunisien, avant la chute du président Zine El Abidine Ben Ali. Né le 20 mars 1983 à Sfax, capitale du sud tunisien, ce  bachelier dénonce les maux de la société tunisienne dans ses textes engagés. « Je veux attirer l’attention du Raïs sur la misère et la répression » explique-t-il. Fin 2010, El général avait mis en ligne une seconde chanson intitulée « Raïs lebled » (Le chef du pays) qui interpelle directement le président Ben Ali sur la misère sociale du pays, la violence du régime et le chômage des jeunes. Dans cette chanson en forme de lettre ouverte il appelle le président à descendre dans la rue pour voir les jeunes au chômage et les gens qui ne trouvent pas de quoi manger. Son troisième texte « Tounis Bledna » (La Tunisie notre pays) critique également la corruption du régime et la détresse du peuple tunisien. En trois raps en forme de missiles diffusés sur les réseaux sociaux tunisiens, Hamada Ben Amor est devenu le porte-parole d’une jeunesse désespérée.

Mais sa liberté de parole n’est pas du goût des autorités et lui a valu d’être arrêté le 6 janvier dernier à 5h30 du matin par 30 policiers à son domicile de Sfax, capitale du sud tunisien. « Les policiers, venus à bord de plusieurs voitures ont encerclé la maison et lui ont demandé de les suivre » raconte son frère.  C’est dire la menace qu’il représente pour le régime de Ben Ali ! Puis il a été libéré après trois jours. Les policiers cherchaient à savoir s’il avait une appartenance politique et lui ont demandé de renoncer à ses idées. Depuis son arrestation, on ne parle plus que de lui et il est devenu l’un des visages de la contestation civile qui secoue la Tunisie depuis l’immolation par le feu de Mohammed Bouazizi le 17 décembre à Sidi Bouzid.
Aujourd’hui, le Raïs a quitté le pays. Quant à El général,  il affirme avoir été sollicité par plusieurs maisons de disque nationales et étrangères.  « Je compte maintenant me concentrer sur le rap et enrichir mon répertoire de plus de trente chansons » annonce-t-il.

Edwige Géraldo.

La presse égyptienne : une révolution dans la révolution

18 Fév

Les journaux changent de ton depuis le départ d'Hosni Moubarak

La révolution égyptienne est en marche pour les citoyens mais aussi pour la presse qui tente une révolution dans la révolution. Le ton des journaux a radicalement changé depuis le début des protestations. La mort du journaliste Ahmed Mohamed Mahmoud le 3 février dernier a sans doute été l’évènement qui a emballé la machine de la révolution médiatique. Mais peut-on pour autant désormais parler d’une totale liberté de la presse égyptienne?

Sous le régime d’Hosni  Moubarak la création d’un journal relevait du parcours du combattant, les critiques envers le régime s’avéraient quasiment impossible. 99% des maisons de presse appartenaient au gouvernement, ce qui lui permettait de censurer un journal à tout moment. Malgré la situation , la presse indépendante a réussi à s’imposer dans les kiosques aux côtés de la presse gouvernementale officielle, mais pour elle, difficile de faire face aux quelques 32 articles de loi qui pénalisent les “égarements”. Cette situation a placé l’Egypte au 143ème rang mondial sur 175 pays pour la liberté de la presse en 2011.

A l’aube de la révolution dans le pays, le ton des journaux officiels suivait son cours : l’appel au dialogue était privilégié. « Pendant les 10 premiers jours du mouvement de contestation, la couverture des évènements par les médias égyptiens a été honteuse, dénonce Rasha Abdulla, directrice du programme Journalisme et communication de masse de l’université américaine du Caire,citée par le quotidien américain « The Washington Post » . C’était comme s’ils vivaient sur une autre planète. »

Un vent de liberté souffle sur la presse

La femme de Ahmed Mohamed Mahmoud manifeste le 7 février au Caire

Mais le 3 février dernier, la mort du journaliste Ahmed Mohamed Mahmoud après trois jours passés dans le coma a réveillé la profession. L’épouse du journaliste, témoin direct de l’assassinat de son mari explique les circonstances de sa mort : “Il était à la fenêtre de son bureau qui donne rue Magless el Shaab (Rue de l’Assemblée du Peuple), à proximité du ministère de l’intérieur. Samedi 29 janvier, il a entendu des coups de feu, alors il est allé à la fenêtre, l’a ouverte, et s’est mis à parler au téléphone pour rapporter ce qu’il voyait puis pour filmer la scène. Un officier de police posté sous nos fenêtres l’a vu et lui a demandé de ne pas filmer et de retourner à l’intérieur. Sans même donner à mon mari l’occasion de se retirer , il a orienté son arme vers lui, à visé, et l’a touché à l’œil droit. Mon mari a été emmené à l’hôpital ou il est mort, le jeudi 3 février, après avoir passé 6 jours dans le coma. »

Une marche a été organisé en hommage à Ahmed Mohamed Mahmoud lundi 7 février dans l’après-midi.


Face à cette tragédie, le syndicat des journalistes a demandé la démission du ministre de l’information Anas Feki. Mais quelques jours plus tard les jouralistes demandaient la démission du président du syndicat lui-même, Makram Mohamad Ahmad, nommé par le chef de l’Etat.

« La révolution à ‘Al-Ahram’ ”

Les mouvements de protestation au sein de la profession se sont alors multipliés. « La révolution partout en Égypte, la révolution à ‘Al-Ahram’ ” ont scandé les journalistes d’un des  principaux quotidiens gouvernementaux, pour dénoncer la corruption et les responsables du journal. À « Rose el-Youssef » ils ont demandé la démission du rédacteur en chef Abdallah Kamal.

Mais au départ d’Hosni Moubarak, les journaux ont effectué un virage à 180 degrès en saluant la “Révolution des jeunes”. “ Le peuple a fait tombé le régime”, “ les jeunes d’egypte ont ont obligé Moubarak au départ”, titrait en une Al-Ahram.

La presse égyptienne félicite la révolution des jeunes après le départ de Moubarak

Pour autant, ce revirement de dernière minute des journalistes n’a pas toujours porté ses fruits.
Le présentateur vedette de la télévision égyptienne, Amr Adib, venu parler à ceux qui campent depuis plus de deux semaines dans le centre du Caire, a été bousculé et insulté, avant d’être chassé de la place Tahrir.

Waël Qandil, directeur de la rédaction du quotidien indépendant «Al-Shourouk» explique cependant qu’il est encore tôt pour parler d’une véritable liberté d’expression : « les médias d’État suivent l’évolution du discours officiel, explique-t-il, ils essaient simplement de prendre le train en marche. Mais ceux qui feraient usage d’une réelle liberté d’expression seraient toujours la cible d’attaques du pouvoir. »

Wael Ghonim, cybermilitant, héros malgré lui

18 Fév

La révolution égyptienne a trouvé son héros, sa voix. Il s’appelle Wael Ghonim et travaille pour le géant Google au Moyen-Orient. Près d’une semaine après la chute d’Hosni Moubarak, la population égyptienne n’est pas prête d’oublier celui qui est considéré comme l’instigateur du soulèvement, qui a débuté le 25 janvier dernier.

Wael Ghonim, cadre chez Google, a joué un rôle-clé dans la mobilisation de la jeunesse égyptienne sur Facebook et l’a payé d’un séjour en prison. C’est en janvier que ce jeune trentenaire, sous le pseudonyme « Shaheed », créé un groupe sur le réseau social Facebook : «Nous sommes tous des Khaled Saïd », du nom du jeune blogueur battu à mort par des policiers en civil, en juin 2010. Rapidement, cette page devient le point de ralliement des manifestations contre le gouvernement, qui commencent le 25 janvier.
Wael Ghonim jouait déjà un rôle important bien avant le début du soulèvement contre la dictature. Mais le 7 février dernier, c’est en véritable héros qu’il a été accueilli place Tahrir, au Caire.

Le 27 janvier, alors qu’il manifestait dans les rues du Caire, au milieu d’une foule d’opposants au régime Moubarak, Wael Ghonim est arrêté.

Pendant douze jours, il est porté disparu. Pendant douze jours, ses amis et sa famille le cherchent, redoutant le pire : le voir subir le même sort que Khaled Saïd. Il était en fait interrogé par la Sécurité d’État à propos de son groupe Facebook.

Héros malgré lui …

Aujourd’hui libéré, Wael Ghonim est un véritable héros, malgré lui … Après sa libération, il accorde un entretien devant les caméras de la chaîne privée Dream 2 (voir vidéo ci-dessous). Le jeune homme raconte sa détention, parle de la révolution. Un entretien chargé d’émotion, suivi par des millions d’Egyptiens.
Et sa popularité ne cesse de croître. Plus de 160 000 personnes se sont déjà inscrites sur un groupe Facebook pour lui demander de devenir le porte-parole de la révolution égyptienne.

Et pourtant, le cybermilitant ne pense pas mériter ces ovations. « Je ne suis pas un héros », a-t-il clamé lors de son entretien sur Dream 2. « J’étais endormi pendant douze jours », faisant référence à sa période de détention. « Les héros sont ceux qui étaient dans la rue, ceux qui se sont fait tabasser, ceux qui se sont fait arrêter, qui se sont mis en danger. Je ne suis pas un héros. »

Pour le jeune militant, cette révolution appartient avant tout à la jeunesse internet, à la jeunesse égyptienne, à tout le peuple. « Il n’y a pas de héros. Personne ne doit voler ce rôle. Nous sommes tous des héros. » Wael Ghonim, un homme qui a ému des milliers d’Égyptiens à sa libération, à travers ses paroles prononcées à la télévision égyptienne. Honnêteté, émotion, sincérité, il est le premier à émerger parmi les « enfants de Facebook », qui ont créé les conditions de cette révolution. Et les Égyptiens sont convaincus que l’on n’a pas fini d’entendre parler de Wael Ghonim.

Depuis sa remise en liberté, le jeune homme a repris son activité sur le net, et notamment sur Facebook et Twitter, appelant les Égyptiens à poursuivre cette révolution, qui n’est pas encore terminée.

Sur Twitter, Wael Ghonim continue d'adresser ses messages à la population égyptienne. "La révolution n'est pas terminée".

Avec d’autres cybermilitants, il a également rencontré l’armée pour discuter des réformes démocratiques promises, après la dissolution du Parlement et la suspension de la Constitution. Pour autant, Wael Ghonim affirmait sur Twitter mardi qu’il n’appartenait à aucun groupe politique : « Just a clarification to all Egyptians: I don’t belong to any political alliance. I don’t support anyone for presidency. Thats not my role ».

C’est donc de chez lui, sur son ordinateur, que Wael Ghonim a commencé à manifester. Comme de nombreux autres révolutionnaires, il a su tirer parti des réseaux sociaux sur Internet pour rassembler les revendications des Egyptiens. Et c’est aussi sur Twitter que le jeune cyberdissident annonce la sortie prochaine de son livre : « Révolution 2.0 »

Tunisie : l’organisation culturelle de l’après Ben Ali

18 Fév

Le monde culturel tunisien a beaucoup souffert en 20 ans de régime Ben Ali. « La censure a étouffé la créativité, l’absence de moyens financiers a démotivé les artistes et rendu impossible la réalisation de certains spectacles ou films », explique Habib Belhedi, producteur de la pièce Amnesia. « Tout le système était contre nous. Pour faire exister des œuvres audacieuses, il fallait être très persévérant, avoir soif de créer et de dénoncer. On répétait comme des nomades, sans salle, sans argent, sans certitude de pouvoir montrer la pièce au public un jour. »

 

 

Amnésia relate justement le départ de Ben Ali et la libération de la censure. Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi, les deux auteurs de la pièce, font désormais office de figures de proue de la démocratie tunisienne. Ils ont résisté à la censure pendant des années.

 

Le malaise de la société tunisienne était déjà perceptible, bien avant la chute de Ben Ali, notamment dans les œuvres de certains artistes engagés. La poésie d’Ouled Ahmed prophétise « la révolution de Jasmin » bien avant l’heure. Nouri Bouzid, évoque le désarroi de la jeunesse qui sera à l’origine des premières émeutes  dans Making Of, un film engagé et visionnaire.

 

« On sentait, dans le travail d’artistes-peintres comme Mohamed Ben Slama ou Dali Belkadhi, une très grande ­colère, une frustration qui étaient à l’œuvre dans toute la société », explique le galeriste Lotfi El Hafi, patron de l’espace d’art Mille Feuilles, à La Marsa.

 

Bien avant la révolution, le monde de l’art faisait déjà la sienne. Depuis, les artistes se sont organisés et on définit des axes de développement prioritaires : « Avec d’autres collègues galeristes, nous nous sommes déjà réunis à plusieurs reprises pour coordonner nos revendications », souligne El Hafi.

 

Même au Maroc, les artistes ont mené des réflexions quant à l’avenir de l’industrie culturelle.

 

Leur but ? Développer une véritable économie de la culture. « Jusqu’ici, l’argent n’était pas donné en fonction de critères artistiques. Pour aller au bout de ses projets, il fallait compter sur l’étranger : mon festival n’existe que grâce aux subventions de l’Union européenne », explique Riahi, célèbre chanteur tunisien.

 

Et maintenant ?

En Tunisie, les lieux culturels sont trop concentrés « En dehors des grands centres urbains, la culture est quasi-absente, alors que c’est là que les jeunes ont le plus besoin de nous. Il faut mettre les médias à contribution pour sensibiliser les masses populaires à l’art et à la culture », préconise Wafaa, danseuse. « Quand on entend les slogans des émeutiers, qu’on écoute leurs chansons, on se rend compte à quel point ce peuple est imprégné de poésie et en demande de beauté », analyse le poète Tahar Bekri.

 

Si l’optimisme est désormais de mise dans le monde culturel tunisien, certains appellent tout de même à la vigilance. Des interrogations persistent quant au futur contrôle des médias, à la liberté d’expression et à la place de la culture dans la future société.

 

Antoine Mariaux et Tristan Scohy

Vogue la galère : le périple des migrants tunisiens

18 Fév

Ils ont entre vingt et trente ans. On les appelle les « harragas ». Ces migrants tunisiens ont peu d’espoir en l’avenir politique et économique de leur pays. Alors ils prennent le large, sur des embarcations de fortune. Au péril de leur vie.

Entre samedi et dimanche dernier, plus d’un millier de Tunisiens ont afflué vers les côtes italiennes. Sur l’île de Lampedusa, première étape de leur voyage, les autorités italiennes tentent de gérer le flot de ces « vogue la galère ». Ils sont cinq mille immigrants à être arrivés jusqu’ici, avec un seul espoir : trouver un emploi. Et profitent du souffle de liberté apporté par la révolution de Jasmin pour tenter leur chance de l’autre côté de la méditerranée.

Si la route n’est pas si longue, elle n’en demeure pas moins dangereuse. Les barques de fortune où sont entassés les migrants ont aussi fait des victimes. Cinq « harragas »ont trouvé la mort vendredi et trente autres ont disparu aux larges des eaux internationales. Les huit survivants ont accusé les garde côtes tunisiens d’avoir provoqué une collision. Les autorités se sont défendues en affirmant que la barque ne voulait pas répondre aux injonctions des autorités de rebrousser chemin et en tentant de fuir la barque aurait percuté leur vedette.

Une fois arrivés sur l’île de Lampedusa qui compte quelques 5000 habitants, les immigrants tunisiens sont placés dans des hébergements d’urgence. Un centre fermé en 2009 a été rouvert pour l’occasion. D’une capacité de 850 places il accueille actuellement 2200 tunisiens. Les quelque 3000 autres sont répartis dans des centres en Italie (Bari, dans les pouilles, Calabre, Crotone, ..).

« Les autorités tunisiennes ne jouent pas leur rôle de gouvernance »

La situation tendue est une aubaine pour les déçus et les opposants au gouvernement transitoire. Mustapha Ben Jaafar, professeur de médecine et démissionnaire du régime provisoire, est excédé. Il accuse le nouveau pouvoir d’être incapable de maîtriser ces mouvements migratoires. Pour lui, le système sécuritaire est défaillant et les autorités ne jouent pas leur rôle de gouvernance.

Dans ces conditions, la réaction européenne ne l’étonne pas.
En effet, l’Italie a demandé vendredi une aide de dimension européenne pour pouvoir faire face à cet afflux. L’agence européenne Frontex pour la surveillance des frontières a répondu à cet appel. Trente à quarante personnes devront alors être mobilisées ainsi que des navires et des avions. Bruxelles a, pour sa part, lancé une demande de financements auprès des pays membres lundi. Rome réclame 100 millions d’euros à l’U.E.
Pour le spécialiste des dynamiques migratoires autour de la méditerranée, Mehdi Lahlou, le déploiement d’un tel dispositif est inutile. Il considère qu’ « il s’agit d’un flux exceptionnel, liés aux événements récents survenus en Tunisie et non d’une tendance durable ».

 

Lucie Thiery

Le rap, bande-son des révolutions arabes

18 Fév

Le hip-hop arabe a longtemps eu du mal à s’exprimer. La censure lui préfère les mélodies énamourées du raï, sans substance politique. Mais les mouvements récents de révolte sont en train de changer la donne. La parole se libère, et avec elle les textes des rappeurs.

El General, rappeur et symbole de la révolte tunisienne.

Depuis quelques semaines, les clips de hip-hop critiquant les régimes arabes se multiplient sur Internet.  Dans ces vidéos: revendications sociales, condamnation de la corruption et de la classe politique… Mais aussi appels à la révolte ou hommages aux manifestants. En provenance de Tunisie, d’Egypte, d’Algérie ou même de Lybie, les chansons des rappeurs soufflent sur les braises de la révolte. Dernière arrivée sur le net, cette vidéo présente les heurts de la nuit de mardi à mercredi en Lybie. En arrière plan, un morceau de hip-hop clamé en arabe. 

Les images de violence sont entrecoupées de slogans politiques. Enough! le titre est clair, le style aussi: l’heure n’est pas à la franche rigolade.

En Égypte, même ambiance. Ce blog d’informations francophones recense les hymnes hip-hop de la révolution qui a vu tomber Moubarak. Même sans comprendre les paroles, l’énergie est palpable.  Ce clip, posté le 21 janvier – en plein troubles – débute sur un logo présentant un poing fermé surplombant le mot révolution.

Et les Égyptiens ne sont pas seuls. Des artistes internationaux viennent les épauler. Le clip ci-dessous a été produit par quelques artistes américains et canadiens. Le titre, #25janv est à la fois une référence au 25 janvier,  la date qui a vu le mouvement égyptien débuter, et aux hashtags de twitter, un des principaux outils de communication  des manifestants et de leurs soutiens.

En France, c’est le fils d’Ali Mecili, l’opposant algérien assassiné à Paris en 1987, qui dézingue le président  Bouteflika – et ses soutiens français- dans son titre 90%.

Un  soutien international qui fait écho à la solidarité clamée par la Zulu Nation du début du hip-hop. Né dans les ghettos noirs américains, le rap a toujours eu une frange revendicative. Les pionniers Africa Bambataa, Public Enemy, ou Nas un peu plus tard,  dénonçaient dans leurs textes la situation sociale des Afro-américains. En débarquant en Europe, notablement en France,  le hip-hop amène lui avec sa colère et ses désirs de révolte. « Qu’est ce qu’on attends pour foutre le feu » clamait NTM en 1995.

Depuis, le rap a essaimé partout dans le monde. Il est devenu multi-forme.  Dans les boites de nuit et les bars plus ou moins branchés, c’est désormais une musique festive et légère.  Mais il n’a jamais déserté les quartiers populaires ni coupé ses racines contestataires. C’est de là qu’il puise sa force originelle  et c’est là que sont créés les brulots qui inondent aujourd’hui Internet et les pays arabes. Le rap, musique du peuple, a enfin trouvé sa révolution.

La liberté est dans les places

18 Fév

Place Tahrir, place du 7 novembre, place de la Perle. Les centres des villes, entrées en résistance pour obtenir des réformes démocratiques, font l’actu en ce moment. La place Tahrir au Caire est déjà passée à la postérité. Lumière sur ces lieux qui font des émules dans le monde arabe.

Chronologiquement, la place du 7 novembre à Tunis mérite la primeur de ces lignes. Il semblerait que l’effet-domino ait joué à plein et la contestation tunisienne a entraîné le monde arabe dans son élan révolutionnaire. Même si le mode opératoire ne sera pas repris. La Tunisie s’est d’abord embrasée en province contrairement à Égypte ou au Bahreïn. A Sidi Bouzid exactement, dans le centre du pays, à 260 km de la capitale.

Afficher Sidi Bouzid, là où tout a commencé sur une carte plus grande.

Le 17 décembre à Sidi Bouzid, un marchand ambulant s’immole pour protester contre la confiscation de sa marchandise par la police. Son geste fait basculer le pays dans la révolution. Les révoltes prolifèrent en province. À Tunis, place du 7 novembre, il faut attendre le 27 décembre pour voir les manifestants défiler. Cette place fut nommée ainsi le jour où Ben Ali déposa Bourguiba le père de la nation tunisienne en 1987. Une appellation amenée à changer après l’éviction du dictateur. Le futur nom donné à la place coule de source : ce sera la place Bouazizi du nom du marchand décédé de ses blessures le 4 janvier dernier. Considérée comme le premier souffle qui embrasa une situation incandescente, sa mort attisera le désir de changement de ses compatriotes. Jusqu’à la fuite de Ben Ali qui libéra le pays le 15 janvier. La place centrale de la capitale abrite alors des manifestations mêlant revendications sociales et appels à un nouveau gouvernement.

Égypte reprend le flambeau révolutionnaire. Le 25 janvier, au Caire et dans plusieurs villes de provinces, 15000 personnes manifestent contre le régime de Moubarak. Alors que le gouvernement instaure un couvre-feu et coupe tout accès à internet, les Égyptiens bravent l’interdit et accentuent la pression. La place Tahrir (littéralement place de la libération) est alors témoin de heurts sanglants.

Preuve d’un désaveu terrible, l’armée prend le parti de la population et promet de ne pas ouvrir le feu. La place Tahrir devient le symbole de la révolution du Nil. On y photographie soldats et manifestants s’embrassant. Le 1er février, plus d’un million de personnes défilent dans tout le pays. La place Tahrir est noire de monde. Jusqu’au départ de Moubarak, la place ne désemplit pas nuit et jour malgré les sommations du gouvernement honni. Pacifisme et créativité caractérisent la place de la libération. Les manifestants rivalisent d’ingéniosité pour coiffer leur tête et crier leur rage.

La mobilisation est hétéroclite, jeunes vieux mais aussi femmes et enfants, les Egyptiens font l’histoire. Jusqu’au feu d’artifice du 10 février qui fête le départ du président. La presse salue le lendemain l’issue des manifestations. France Culture y consacre des émissions spéciales en direct.

Les Cairotes eux sont toujours là pour nettoyer et faire passer des messages. Un sexagénaire s’écrie : « C’est une nouvelle Egypte. C’est le jour 1 de l’histoire de l’Egypte ». D’autres se scotchent des papiers tout en humour : « désolé pour le dérangement, nous bâtissons l’Egypte ».

Au Bahreïn ou au Yémen, les manifestations se poursuivent aujourd’hui. Les populations aspirent également à renverser le régime en place. Les manifestations sont marquées par une forte répression. Au Yémen, il y a aussi une place Tahrir, à Sanaa. Mais celle-ci est le théâtre d’affrontements entre pros et anti Saleh, président yéménite. Quelques 3000 personnes se sont encore opposées hier. Les revendications sont d’abord économiques : un tiers des 23 millions de Yéménites sont sous-alimentés et 40% vivent avec moins de deux dollars par jour. Le pays est marqué par un chômage et une corruption endémiques.

Au Bahreïn, petit pays du golfe persique, la place de la Perle voit des opposants au régime se mobiliser. Ils ont été sévèrement réprimés par les forces anti-émeutes. Gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc voire à fragmentation, les manifestants sont dispersés par la force.

Mais les jeunes présents ne désespèrent pas. Leur objectif ? Imiter Tunisiens et Égyptiens… Ils ont d’ailleurs déjà rebaptisé leur place principale place Tahrir. Mais l’histoire ne dit pas si le destin sera aussi pharaonique…

Tunisie : Quand le monde entre en révolution

18 Fév

Ils n’étaient pas dans les rues de Tunis pour la Révolution de Jasmin. D’ailleurs, ils n’étaient parfois même pas en Tunisie. Et pourtant ils sont des centaines de milliers d’internautes à s’être mobilisés, sans même bouger de chez eux.

Eux, ce sont par exemple les milliers de Français qui ont participé aux manifestations virtuelles organisées sur Facebook, comme celle du 14 février. Une manifestation de soutien pacifiste en un seul clic.

Ce sont aussi les membres de la communauté Anonymous. Ce groupe de résistants hackers lance le 2 janvier l’opération « Tunisia » : une cyber attaque pour mettre hors-service le site du gouvernement tunisien. Opération réussie. « Ça a été vu comme une libération psychologique en Tunisie, d’après ce que nous ont dit nos contacts sur place. » (Un membre de la communauté sur liberation.fr).

D’autres, ce sont mobilisés sur Internet mais sont descendus dans les rues du monde entier. De Grenoble à Washington, des groupes, tel que « Tunisiens de Lyon », se forment sur Facebook. Les membres se réunissent pour manifester dans les rues. Haïder, membre du groupe, sait que cela a compté à Tunis : « Quand tu sais que tu as le monde avec toi, ça te donne la force. »

Du téléphone arabe à Internet

Dans ces communautés de sympathisants formées sur Internet, les informations circulaient. Le téléphone arabe laisse place au Web. Sur Twitter, on relaye les dernières informations en un seul clic : le nombre de manifestants, de blessés, les réactions, etc. Les internautes informent les Tunisiens qui n’ont pas ou plus accès à Internet, grâce au téléphone, au courrier ou même par le bouche-à-oreille de ce qui se passe dans le monde et dans leur pays. « Les gens se tenaient informer par Internet » (Slim Amamour, bloggeur tunisien).

Maintenant que la révolution est terminée, le monde continu d’apporter son soutien à la Tunisie. Exemple en France avec l’opération « 1 milliard de PAP (pages avec publicité) pour la Tunisie. » Une opération de sensibilisation depuis les réseaux sociaux pour que les acteurs économiques du Web offrent des pages publicitaires, et donc de l’argent, pour la reconstruction en Tunisie. Près de 100 millions de promesses de dons réunies pour l’instant.

Avec la Tunisie, la Terre a peut-être connu sa première révolution mondiale. L’Egypte a également pu compter sur un soutien international. Et un peu partout sur la Toile des appels à manifester apparaissent pour soutenir la Lybie et l’Algérie.

François Frualdo

 

 

Les révolutions tunisienne et égyptienne provoquent un effet-domino en Lybie

18 Fév
Après les événements survenus en Tunisie et en Egypte, c’est la Lybie qui emboîte le pas de la contestation. Le jeudi 17 février a été proclamé « jour de colère ». Le gouvernement censurant tous les moyens de communication , excepté Internet, l’appel à la manifestation a été lancé sur Facebook, les réseaux sociaux et Youtube apparaissants comme les seuls moyens pour les Lybiens d’organiser leur révolution.
Source Reuters

En Lybie, la contestation est en ordre de marche. Hier, les Lybiens sont descendus manifester leur colère dans les rues des grandes villes. Si les manifestations  trouvent leurs origines dans l’exigence de justice au sujet de la fusillade de  1200 prisonniers dans la prison d’Abou Salim en 1996, les protestataires de Benghazi ont étendu leurs demandes à des revendications politiques et économiques. Les manifestants ont crié des slogans hostiles au colonel Kadhafi et au premier ministre, Baghadadi Al-Mahmoudi. Malgré les avertissements du régime de Kadhafi à ne pas manifester, les Lybiens sont de plus en plus nombreux à se mobiliser. Une Google Map recense toutes les manifestations en cours dans le pays.

 

Source Twitter @Arasmus.

Une mobilisation qui passe principalement par les réseaux sociaux (Facebook, Twitter) et la diffusion de vidéo sur Internet avec pour modèles la Tunisie et l’Egypte.

Ci-dessous, une vidéo diffusée sur Youtube qui appelle les Libyens à descendre dans la rue.

La « journée de la colère » de jeudi a été précédée, dans la nuit de mardi à mercredi, d’une manifestation de plusieurs centaines de personnes à  Benghazi, ville côtière de l’est libyen.

Cette manifestation a été marquée par une violente dispersion par les forces de l’ordre, faisant trente-huit blessés, selon le directeur de l’hôpital Al-Jala, à Benghazi, à 1 200 km à l’est de Tripoli. Il faut rappeler que Benghazi est  un lieu symbolique de la contestation, une ville plus rebelle à l’égard du pouvoir que Tripoli. De plus en plus de vidéos sur la mobilisation des Lybiens circulent sur Internet. Elles prouvent que la contestation populaire monte en puissance au royaume de Khadafi de jour comme de nuit.

Les internautes qui laissent des messages sur le site de l’opposition www.libya-watanona.com, basé hors de Libye, appellent la population à manifester sur les places pour « faire peur à ce régime et à ses partisans et les forcer à fuir, parce que ce sont des lâches ».

La fronde d'élève en Lybie contre le régime du colonel Kadhafi

Le ministère de l’intérieur a limogé  hier un haut responsable local de la sécurité, suite à la mort de deux personnes dans ces manifestations à Al-Baïda, a rapporté le journal libyen Qurina sur son site interne. Les opposants au régime, en plus des réseaux sociaux, utilisent beaucoup la vidéo pour relater les images fortes de leur révolution.

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Hier, une vidéo a été diffusée sur Youtube montrant des manifestants brûler des photos de Muammar Kadhafi avant de s’attaquer à un centre de police dans la région montagneuse de Nefoussa (nord-ouest du pays).

Comme les Tunisiens et les Égyptiens, les Libyens sont présents en nombre sur la toile et utilisent les réseaux sociaux et la vidéo pour hisser la voix de leur contestation. Sur Facebook, le groupe « Jour de colère » recense près de 10 000 inscrits, alors que Facebook compterait près de 300 000 internautes libyens, selon le site spécialisé Socialbakers. A travers ces sites, l’opposition libyenne regroupée sous le nom de « enough » (assez !) appelle au soulèvement. Exemple avec ce clip diffusé sur Internet qui montre les images des affrontements de la nuit de mardi à mercredi.

Pour la plupart des observateurs, les « nouveaux médias » ont rempli un rôle important quant au succès de la mobilisation populaire. Marie Bénilde dans un article consultable en ligne sur les « blogs du diplo » revient sur le rôle que les nouveaux médias ont joué dans la chute des régimes aristocratiques en Tunisie et en Egypte, ce qui nous laisse imaginer ce qui pourrait bien se passer dans les prochaines semaines en Lybie si la contestation prend de l’ampleur. Le quotidien Le Monde y va aussi de son interprétation.

Les chutes rapides de Zine el-Abidine Ben Ali en Tunisie et d’Hosni Mubarak en Égypte sont un rappel que même les régimes “les plus durs” peuvent se révéler fragiles, une fois le manteau de la peur levé. A l’image de ces messages sur Twitter qui traduisent une colère profonde et le besoin de révolution.

Mais malgré les manifestations, beaucoup d’observateurs écartent l’idée d’un scénario à la tunisienne. Au pouvoir depuis 1969, un record désormais en Afrique, Mouammar Kadhafi tient le pays d’une main de fer. Même si certains Libyens se plaignent des nombreuses inégalités sociales et du manque de libertés, la Lybie est un pays exportateur de pétrole. Le pouvoir semble donc pouvoir puiser dans la manne énergétique pour satisfaire d’éventuelles revendications sociales.

Le régime mène depuis quelques jours une propagande intense sur le terrain même des partisans de la démocratie, les médias sociaux, pour dissuader les Libyens de descendre dans la rue aujourd’hui. Mouammar Kadhafi aurait par ailleurs mis en garde contre l’utilisation de Facebook, qui selon lui, participe d’un « complot impérialiste ».

Les autorités libyennes qui filtrent toutes les communications téléphoniques et observent les mouvements sur Internet ont procédé à une vaste rafle de toutes les personnes ayant reçu des appels de l’étranger, qui ont consulté Facebook, qui ont envoyé des messages sms ou qui ont posté sur le net des images des violentes manifestations de mardi soir à Benghazi, la deuxième ville de Libye. Le régime aurait envoyé des sms aux Libyens pour les dissuader de manifester.

Si la révolution a débuté sur la toile, elle a bien pris forme dans la rue. Selon le dernier bilan, huit personnes auraient été tuées depuis mercredi lors des affrontements. Des membres de l’opposition, basés à l’étranger, font état de six morts dans la ville de Benghazi, jeudi.

Après les événements survenus au cours des dernières 24 heures, le Quai d’Orsay s’est dit « particulièrement préoccupé », notamment concernant « l’usage excessif de la violence » (source AFP). On peut déjà s’attendre à une réaction dans les prochains jours des chefs des états européens. Beaucoup d’observateurs sont pressés de connaître les réactions de Nicolas Sarkozy étant donné les relations économiques et stratégiques entretenues avec le colonel Kadhafi.

Yoann Etienne

Le Canada envoie 950 instructeurs en Afghanistan

17 Nov

L'OTAN va discuter de sa stratégie de sortie du bourbier afghan pour ses militaires

La poursuite de la mission militaire du Canada en Afghanistan est un sujet qui divise la classe politique et l’opposition parlementaire à Ottawa. Le Canada a confirmé l’envoi de 950 instructeurs militaires en Afghanistan.

Cette annonce intervient alors que vendredi et samedi aura lieu le sommet de l’OTAN à Lisbonne, pendant lequel sera discutée la stratégie de sortie du bourbier afghan pour les vingt-huit pays de l’Alliance atlantique.
Ce renfort massif est prévu l’an prochain, au moment où les 2800 soldats canadiens en mission seront rapatriés.

Cet effort de formation de militaires afghans finira en 2014, selon le ministre de la défense, Peter MacKay.
La principale tâche de ces instructeurs militaires concernera l’alphabétisation de l’armée afghane, en raison d’un «  énorme problème d’illettrisme ».

Une initiative saluée par Barack Obama

Le Canada joue un « rôle constructif très important », selon le président américain. Washington avait fait pression sur Ottawa afin qu’elle prolonge sa présence militaire en Afghanistan. Mission accomplie, en dépit du retrait des soldats.
Peter MacKay s’en félicite : « Grâce au travail effectué par les forces canadiennes, le pays sera doté d’une force de sécurité nationale professionnelle, capable d’y instaurer un climat plus sécuritaire et plus stable pour le peuple afghan ».
Tout comme Lawrence Cannon, le chef de la diplomatie, qui affirme, non sans fierté, que les Canadiens « n’abandonneront pas le peuple afghan ».

Tristan Scohy